Sunday, March 04, 2012

L’UDPS persiste et signe : les députés singeant au Palais du Peuple seront exclus

Siéger ou singer ?
Assemblée nationale / L'UDPS persiste et signe : les députés seront exclus
(Le Potentiel 01/03/2012)


Où va la République démocratique du Congo ? Interrogation pertinente au moment où l'on assiste à la mise en place progressive des institutions de la République alors que ne cesse d'enregistrer des critiques sur la crédibilité du processus électoral.

Entre-temps, l'UDPS menace les députés élus sous son label d'exclusion si jamais ils continuent à siéger au Palais du peuple. Le parti cher à Etienne Tshisekedi décide donc d'évoluer en dehors des institutions nationales. C'est donc la crise politique qui se précise et s'accentue. Elle prend une dimension multiforme jusqu'à inquiéter les partenaires extérieurs.

On savait déjà que le président national de l'UDPS, Etienne Tshisekedi, candidat à la dernière élection présidentielle, avait rejeté les résultats proclamés par la CENI et confirmés par la Cour suprême de justice. Cette réaction a suscité un débat et des interrogations pour autant qu'elle jetait les bases d'une énième crise politique en République démocratique du Congo. Aussi, soucieux d'éviter à la RDC des jours incertains, des initiatives ont été déclenchées, évoquant la possibilité d'un dialogue.

Le déjeuner chez l'ambassadeur allemand au président national de l'UDPS, confirme bel et bien l'existence d'une crise politique. Il ne faut plus la nier.

Voilà que le Centre Carter saisit ce moment pour rendre public son rapport définitif sur les élections du 28 novembre 2011. Cette organisation de promotion de la démocratie conclut en des termes sévères que le processus électoral en RDC a été entaché de graves irrégularités, que les élections du 28 novembre ne sont pas du tout crédibles. Elles posent nettement le problème de légitimité.

Ce rapport relance ainsi le débat. C'est dans ce contexte que quelques députés de l'Opposition ont décidé de boycotter les travaux de l'Assemblée nationale jusqu'à ce que leurs préoccupations soient prises en considération. Bien plus, l'UDPS menace les députés élus sous son label d'exclusion si jamais ils continuent à siéger au Palais du peuple. Du coup, la crise politique se précise et s'accentue. Elle prend une dimension multiforme jusqu'à inquiéter les partenaires extérieurs. Voire à les diviser.

Des lendemains incertains

Que va-t-il se passer maintenant ? C'est la question fondamentale. Une chose est vraie, c'est qu'en politique, tout fait, tout événement, mineur soit-il, mérite qu'il soit vite géré pour éviter qu'il ne s'éternise avec toutes les conséquences imprévisibles. Ceci dit, la crise politique est là, il faut la gérer.

Autre chose, c'est que rien n'arrêtera la mise en place des institutions nationales. Certes, comme toutes les parties ont reconnu qu'il y a eu de graves irrégularités qui ont été commises, allant jusqu'à poser le problème de légitimité, il faudra un consensus de toutes les parties congolaises pour annuler ces élections. Or, la réponse est bien connue : il n'y aura pas de consensus.

D'autre part, en partant du principe qu'il vaut mieux «de mauvaises élections que pas d'élections du tout», même les partenaires extérieurs ne sont pas prêts à cautionner ce schéma. Ils continueront à privilégier la poursuite du débat national au sein des institutions.

Par ailleurs, l'Opposition semble divisée. Seule l'UDPS est radicale et tranchante, allant jusqu'à menacer ses députés d'exclusion. Voilà une autre dimension de cette crise politique, car la décision de l'UDPS, après la validation des mandats est sans effet. «Ses» députés continueront à siéger au Parlement. Ce qui pourrait avoir des répercussions négatives sur le parti.

Tous ces faits confirment l'existence de la crise politique en RDC. Bien plus, elle s'accentue en prenant des dimensions multiformes. Le fait que l'Occident soit déjà divisée autour de la crédibilité des élections aura des conséquences néfastes sur la classe politique qui sera également divisée. A chacun son parrain ou son parapluie. De ce fait, les institutions nationales vogueront au gré des vagues. Elles seront inefficaces, inefficientes.

Arrêter l'escalade

Il est temps de prendre des initiatives concrètes, réalisables et courageuses. La première chose consiste à favoriser un face-à-face entre Joseph Kabila et Etienne Tshisekedi pour qu'ils prennent la mesure de cette crise en privilégiant les intérêts supérieurs de la Nation et du peuple congolais. Certes, c'est une tâche difficile, mais c'est une voie de sortie de crise pour une solution durable.

Qu'ils se parlent même par personnes interposées crédibles pour dégager un compromis tant les intérêts de la Nation et du peuple ne sont pas à brader. Chacun est bien obligé de mettre de l'eau dans son vin.

Dialogue également au sein de l'Opposition et particulièrement au niveau de l'UDPS. Une fois de plus, appel doit être fait à des stratégies politiques payantes pour qu'il y ait une «suite à suivre» et non «une suite et une fin». Aussi, est-il à retenir que la «rue» est une forme d'expression démocratique. Mais la «rue» ne gouverne pas.

L'Opposition a maintenant une chance unique, UDPS y compris, de faire entendre sa voix au sein des institutions nationales en brisant le rétroviseur pour ne plus tomber dans les erreurs du passé. Une tribune qu'il ne faut jamais renverser. Pragmatisme politique oblige. Surtout que l'Opposition n'a pas du tout les moyens de sa politique de provoquer des élections anticipées.

Enfin, les partenaires extérieurs devront eux aussi se parler. Jouer franc jeu et non entreprendre des initiatives sur fond des intérêts divergents, en cherchant à régler le «leadership» européen ou mondial sur le sol congolais.

C'est de cette manière-là qu'on arrêtera l'escalade et régler la crise politique congolaise qui, depuis 1960, a comme cause principale la «méconnaissance de l'autorité établie». Il n'y a qu'à se souvenir de différentes rébellions, sécessions, guerres de libération… pour reconnaître que les mêmes causes continuent à produire les mêmes effets. Qu'on se le tienne pour dit.


Par Le Potentiel
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